Gérald au terme de 17h12'35'' a bouclé le parcours de 110 Km dans la région du parc des Volcans d'Auvergne.
Bonjour Gérald,
Habituellement le format de l’interview Décalc est plutôt typé « du tac au tac... », mais compte tenu de ton actualité, je te propose une formule « Ultra » au cours de laquelle on va prendre notre temps et se permettre quelques longueurs !
Avant de commencer, on va rappeler ton actualité.
Tu participais ce week-end vendredi 31 et samedi 1er juin 2019 à l’Ultra Trail Volvic Volcanic Expérience, sur le parcours de 110 Km Expérience Chaîne des Puys - Faille de Limagne.
Le parcours est tracé au milieu du parc des Volcans, avec notamment, la traversée du Parc Vulcania, et l’ascension du Puy de Dôme, entre autres… Tu as bouclé cette épreuve en 17h12’35’’. Tu épingles ainsi une belle course à ton actif, et pas n'importe laquelle.
Un grand bravo pour cette belle performance.
Décalc : « Gérald, tu nous as habitué à quelques exploits longues distances, souvent accompagné des copains de Charlieu (Sainté Lyon, Haut Clunysois). Peux-tu nous expliquer ce qui t’a donné envie d’abord de faire du trail, et pour le coup de faire de l’Ultra Trail ? »
Gérald:" Cela s’est fait naturellement, j'ai suivi le groupe qui s'oriente un peu plus trail, et j'adore la nature. Mon envie de me lancer dans l'ultra est venue en deux temps : suite à la Sainté Lyon avec les copains (je n'avais jamais pensé à faire ce genre de course auparavant, moi qui n’avais bouclé qu'un marathon dans la douleur), j'y ai pris beaucoup de plaisir. Le deuxième élément qui m'a convaincu de me lancer a été la lecture du livre "Eat and run" de Scott Jurek (grand ultra trailer américain), il y donne des conseils alimentaires, mais évoque surtout des récits passionnants de ses Ultras.
Décalc : « Comment as-tu décidé de faire ton ULTRA et pourquoi la Volvic Volcanic Expérience, plutôt qu’une autre ? quel fût ton cheminement ? »
Gérald: "A la base j'avais pris l'idée l'année dernière de me lancer sur l'ultra Aquaterra en Corrèze, mais je m'étais blessé pendant ma préparation. Puis quand a été évoquée l'idée de la VVX en sortie club, je suis allé me renseigner (je n'en avais jamais entendu parler auparavant), et là, ça m'est apparu comme une évidence; j'affectionne particulièrement la région du massif central et le profil du parcours semblait idéal avec un dénivelé raisonnable par rapport à des épreuves alpines ou pyrénéennes.
Décalc : « J’imagine qu’on ne débarque pas sur la ligne d’arrivée sans avoir préparé son affaire ! Depuis deux ans, tu montes en puissance, mois après mois. Peux-tu nous expliquer comment, ces derniers mois, tu as construit ta préparation pour cette course bien particulière ? »
Gérald: "J'ai suivi un plan d'entraînement trouvé dans un magazine spécialisé, celui-ci était conçu spécialement pour l'épreuve VVX, je l'ai un peu aménagé en m'inspirant de ce qu'on avait fait avec le groupe auparavant. Il s'étendait sur trois mois (j'avais déjà augmenté le volume un mois avant). Je faisais quatre séances par semaines: 1 séance cool, 1 séance fractionnée, 1 séance vélo, 1 sortie longue, et j'allongeais petit à petit.
Décalc : « Nous y voilà…Volvic, l’ambiance du village de départ, les coureurs et la course qui s’approche. Que retiens-tu de ces moments d’avant course ? »
Gérald: "Je dois avouer que j'étais un peu fébrile, stressé. Je n'en ai pas vraiment profité, j'ai simplement assisté à une petite conférence donnée par les élites, impressionnant de voir Kilian Jornet en vrai. Et j'ai pu discuter avec l'américaine Meghan Laws, très sympathique et abordable, mais mon niveau d'anglais étant ce qu'il est, ça a été assez bref.
Décalc : « Coup de pistolet, le départ est lancé…peux-tu nous décrire le parcours, ton ressenti sur ces paysages, les lumières, les senteurs et les bruits de la nuit et du jour que tu as découvert au fur-et-à mesure de ton périple ? »
Gérald: "Le parcours était vraiment sympa, un enchainement de petites collines (en fait des volcans), le matin, les premières étaient brumeuses, fraiches, puis après un très "fun" passage dans Vulcania, le Puy de Dôme, bien frais encore, mais grandiose, un très beau point de vue. L'après-midi était différente, du fait du soleil, de la chaleur, on avait l'impression d'être dans une autre région, des paysages faisant parfois penser à l'Aubrac, à l'Ardèche.
Décalc : « Nous voilà imprégniés de l’ambiance de la course…Maintenant, peux-tu nous parler de ta course. Comment s’est-elle déroulée ? »
Gérald: "La première partie s'est très bien passée, j'en étais moi-même étonné, les jambes tournaient bien, pas de douleurs, au 60ème kilomètre, j'ai commencé à fatiguer, il était environ la mi-journée, j'ai nettement ralenti le rythme, comme la majorité des concurrents autour de moi, j'alternais course/marche en fonction de mes passages biens/moins biens. J'ai eu la chance de ne connaitre ni chute, ni blessure, mais sur les tous derniers kilomètres, mes genoux étaient en lambeaux, j'ai dû serrer les dents dans les descentes.
Décalc : « Sur une telle distance, tu as dû passer par tous les états…de l’euphorie à la détresse totale, notamment dans le dernier tiers de l’épreuve… Comment gères-tu ce corps qui se met en mode « sécurité », ou « limitateur de vitesse » ou encore en mode « survie » avec en même temps ces petites voix qui te disent d’arrêter ou de continuer ? Peut-être que je me trompe ?"
Gérald: " C'est très difficile à expliquer, moi, je suis dès le départ dans ma bulle, tête dans le guidon. Je perds la notion du temps, j'adore ça. Sachant que sur ce genre de distance, les choses se passent rarement comme prévu, et vu que c'était ma première, j'avais un sentiment d'appréhension omniprésent, la hantise de l'abandon. Dans le très dur, au 70/80 -ème, je l'ai envisagé, me voyant hors délais (perte de notion du temps...). J'ai pas mal gambergé, je me suis dit que ce serait bête, après tous ces sacrifices lors de ma préparation, j'ai aussi repensé à tous les gens qui m'avaient donné leurs encouragements. Sur la fin, au dire de mes proches, j'étais dans un état second, comme pas mal d'autres coureurs, sans doute la fatigue ou les hormones...
Décalc: "Qu'est-ce qui se passe dans ta tête quand tu vois la ligne d'arrivée ? quand tu l'as franchie et ces quelques minutes où tu réalises que tu l’as fait ?
Gérald: " Là pareil, indescriptible, j'étais dans un tel état de fatigue, accumulée depuis toutes ces semaines, que j'ai réalisé un peu plus tard."
Décalc : "Que retiens-tu de cette expérience ?"
Gérald: " Je retiens qu'il faut croire en soi! Certains trouvaient mon idée folle, disproportionnée... J'ai fait fi de toutes ces critiques et je suis resté déterminé.
Je retiens aussi les sages paroles du coureur élite Dawa Sherpa, engagé sur le 43 kilomètres, alors qu'il a déjà remporté l'UTMB, et qu'il aurait pu s'aligner sur le 110 avec de belles prétentions, il a préféré un circuit plus modeste, parce qu'il n'avait pas envie de trop s'entrainer cette fois ci, parce que la course à pied doit rester avant tout un plaisir..., à méditer... »
Décalc: "Notre traditionnelle question du j'ai aimé, j'ai pas aimé":
Gérald : «
J'ai aimé:
-L'organisation, avec une armada de bénévoles au top.
-L'ambiance générale, un peu fête de village.
-Toutes les bonnes ondes, encouragements de mes proches, des copains du club, avant , pendant, après. Et mes soutiens sur place.
Je n’ai pas aimé:
-Mon petit malaise après avoir passé la ligne d'arrivé.
-
-»
Décalc: " 2019 est déjà bien entamée. J’imagine que tu vas prendre quelques semaines de repos pour bien récupérer. Est-ce que tu as néanmoins quelques objectifs planifiés pour cette fin d’année ?"
Gérald: "Je vais voir en fonction des sensations, essayer de couper pour retrouver l'envie. Si celle-ci revient rapidement, peut-être irais-je avec certains des copains sur la Stevenson, mi-juillet... »
Merci de t’être prêté au jeu de l'interview Décalc, et à très bientôt sur les chemins Charliendins.